Présentement, tout le Sénégal en général et Bargny en particulier sont sous le coup de l’émotion, comme ils l’ont toujours été devant les drames passés, ceux du présent et malheureusement pour ceux qui se produiront inévitablement.
Le massacre maritime a dépassé tout entendement
Cette semaine nous avons eu droit à des Unes de journaux macabres, tant le massacre maritime a dépassé tout entendement. Bargny très endeuillé, une dizaine d’âmes dit-on, n’a pas perdu comme il est dit et écrit deux cents soixante-quinze personnes. La mer de Bargny-Sur-Mer s’est transformée en Aéroport Maritime International de Bargny (AMIB) avec des pistes d’embarquement correspondant à ces célèbres plages comme Ngadié, Roukhou Diagne, Khembé et Gouye Dioulancar d’où est partie nuitamment cette embarcation avec trois cents personnes à son bord. En réalité les candidats à l’immigration irrégulière viennent de tous les coins du Sénégal, certain affluent depuis les pays de la sous-région. L’ampleur désastreusement exponentielle d’un tel drame social n’est certainement pas sans causes, en majorité imputables à un profond mal vivre dans une localité aujourd’hui entre le marteau et l’enclume d’une activité de pêche en rade conjuguée avec un néant de productivité agricole de subsistance à jamais disparue avec son arrière-plan broussard amputé du domaine foncier qui se prêtait au temps à des travaux champêtres dont l’abondance des récoltes étaient synonyme d’équilibre social !
Hélas ces deux mamelles nourricières ont disparu sous l’action conjuguée des prédateurs fonciers, du découpage administratif amputant le pôle urbain de Diamniadio du périmètre communal bargnois et l’érosion côtière. Combien de fois avons-nous crié avec mégaphone et sous tous les toits que Bargny fait l’attention d’une attention moindre de la part des pouvoirs publics ? Qui n’est pas ému par le désastre écologique et environnemental grandissant que constitue la commune de Bargny ? Et la séculaire Sococim ? Et la Centrale à charbon ? Et Tosyali qui doit construire son complexe sidérurgique dans le quartier de Wakhandé ? Voilà Bargny devenu un espace tragique où se joue un drame silencieux qui n’émeut plus personne. Et l’expression d’un tel sentiment d’impuissance devant le harcèlement létal de tant de menaces, si elle n’aboutit pas au désespoir et à la résignation, fait tenter l’irréparable chez les plus jeunes qui par nombre incalculable se jettent éperdument dans les océans.
Déplorer l’état de non-assistance à terroir en danger
À l’arrivée, Bargny devenu une peau de chagrin est sous de faux dehors urbanistiques cachant mal une ghettoïsation accrue de ses étouffants quartiers doublée d’un état de dépérissement économique tentaculaire, faute de leviers infrastructurels de base qui devaient pouvoir perpétuer et rentabiliser ses deux mamelles productives. Jusqu’aux potentialités aqua-touristiques d’amont en aval de Houloupe, ce majestueux cours d’eau autrefois une sorte de Mississipi local dont la restauration s’impose sans tarder par rapport à sa mise en valeur à devoir orienter vers la pisciculture, le maraîchage, sans oublier l’aménagement au niveau de la baie de Ngadié d’un ouvrage servant de quai de pêche où arrimer la flotte piroguière !
Tout en nous inclinant à la mémoire des filles et fils de Bargny tombés prématurément dans les champs d’honneur des profondeurs océaniques, nous ne pouvons que déplorer l’état de non-assistance à terroir en danger, objet qui plus est, de tant d’agressions foncières à asphyxier toutes ses niches de productivité économique, escomptées pour une revalorisation de ses ressources humaines juvéniles dans le sens d’une employabilité soutenue, à générer des revenus stables, qui devaient pouvoir endiguer par anticipation cette hémorragie de bras valides comptabilisés hélas à pertes et profits macabres.
Devra-t-on continuer à faire de la comptabilité macabre sans situer les responsabilités de ce drame juvénile innommable, au moment où le Sénégal s’apprête à inaugurer son premier baril de pétrole et ses gazoducs ? Assurément non ! De qui devra t-on parler ? Des responsables mercantilistes de ces embarcations meurtrières et tueuses de personnes ?Des passeurs ? Des rabatteurs ? Du migrant ? Des populations riveraines qui ferment les yeux par ignorance ou par complicité ? Des parents contributeurs bénissant leur progéniture ? Du responsable municipal ou politique ? De l’Étatresponsable de la surveillance côtière ?
Rendre comptables tous les membres actuels du gouvernement de tous les morts
Ce drame difficilement acceptable mérite que tout Bargny fasse des assises où toutes les couches de la population devront être interpellées. La société civile, les politiques, les syndicalistes, les étudiants, les élèves, les pêcheurs, les élus locaux doivent faire un « LEUL » qui sera une sorte de « NDEUP »conjuratoire à ce démon de l’immigration irrégulière qui envoûte la jeunesse bargnoise. Mais à l’échelle nationale, en regardant l’étendue des émotions exprimées par les sénégalais de la diaspora et d’ici, lors de la mort de Papito Kara et des jeunes de Bargny, ne faudrait-il pas initier une pétition historique, rassemblant des millions de soumissionnaires ? Et deux raisons valables pourraient la pousser. D’abord rendre comptables tous les membres actuels du gouvernement de tous les morts consécutifs à la présente émigration irrégulière, qui semble une édition secrète ourdie par le pouvoir. Que tous soient poursuivis, car le mutisme officiel et la prise de parole tardive du chef de l’état sont impardonnables. Ensuite que le prochain chef de l’état s’engage à respecter cette pétition comme demande sociale incompressible. Enfin que tous les candidats à l’élection présidentielle de 2024 se prononcent expressément sur cette question.
ALIOUNE SECK DE BARGNY ET GORGUEZ DIOP