Le Tribunal de grande instance de Dakar, siégeant en chambre des flagrants délits, a jugé ce lundi 23 juin 2025 une affaire singulière mêlant promesse de voyage, remise de fonds, et disparition mystérieuse d’un tiers. À la barre, une dame âgée, née en 1996 en Guinée Conakry, accusée d’avoir escroqué une somme de sept millions de francs CFA à une autre femme du même nom, Madame Camara.
Une relation de confiance vite rompue
Selon les déclarations de la partie civile, la prévenue lui aurait proposé de faciliter les démarches pour un voyage à l’étranger, moyennant le versement de plusieurs millions. Confiant dans les promesses faites, elle lui aurait ainsi remis un montant global de sept millions de francs CFA, qu’elle n’a jamais pu récupérer. Aucun billet, aucune procédure officielle, ni aucun document de voyage ne lui auraient été remis par la suite.
Une version de la défense fondée sur un rôle d’intermédiaire
Face aux accusations, la prévenue a adopté une ligne de défense simple : elle ne serait qu’un maillon intermédiaire dans une chaîne d’acteurs impliqués dans l’organisation du voyage. Elle a cité nommément un certain Monsieur Lo, présenté comme l’instigateur principal de l’opération, ainsi qu’une femme dénommée Marième.
« Je n’ai fait que transmettre l’argent que je recevais à Monsieur Lo. Moi-même, j’ai remis un total de 5 495 000 francs CFA à ce dernier. Je ne suis pas responsable si le voyage n’a jamais eu lieu. Madame Camara me reproche de l’avoir escroquée, mais c’est elle qui m’a présenté Monsieur Lo. Je ne le connaissais pas auparavant », a-t-elle soutenu devant le juge.
Une arrestation à l’aéroport et la fuite du principal suspect
La prévenue a également expliqué les circonstances de son arrestation. Revenue récemment de voyage, elle aurait été appréhendée dès sa descente d’avion à l’Aéroport international Blaise Diagne (AIBD) de Diass. Le principal suspect, Monsieur Lo, reste quant à lui introuvable, ce qui complexifie davantage l’affaire. La prévenue affirme n’avoir aucun contact avec lui depuis sa disparition, ce qui l’empêche, selon elle, de justifier l’usage des fonds.
Le parquet requiert la rigueur de la loi
Malgré ces explications, le représentant du ministère public a estimé que les éléments du dossier constituaient une infraction claire. Il a requis l’application stricte de la loi pour escroquerie, en soulignant que la responsabilité pénale ne pouvait être éludée par la simple invocation d’un tiers.
Un accord entre les parties et une issue conditionnelle
Cependant, les avocats de la défense et de la partie civile ont proposé une solution alternative. Les deux parties se sont accordées sur le principe d’un remboursement intégral de la somme escroquée, avec un échéancier à convenir. Le tribunal a finalement décidé de relaxer la prévenue, sous réserve du respect de cet engagement formel.
Cette affaire met en lumière les nombreuses dérives constatées dans les circuits informels de facilitation de voyages. Des intermédiaires non agréés, des versements de fonds sans garantie légale, et une absence totale de traçabilité conduisent régulièrement à des litiges, voire à des poursuites pénales. Elle interpelle également sur la vulnérabilité de certaines personnes, souvent peu instruites sur les procédures administratives, face à des réseaux opaques et parfois frauduleux.
Cheikh Thiam