Invité hier de l’émission Grand Jury de la RFM, Fadilou Keïta a fait de graves révélations. En effet, le Directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) dit être «tombé sur une lettre de confort pour 15 milliards FCFA pour la location de véhicules» et «des milliards tirés sur les comptes du Sénégal» entre le 24 mars 2024, date de l’élection présidentielle, et la prestation de serment du Président Bassirou Diomaye Faye, le 02 avril 2024. Le responsable de Pastef soutient également que Ahmed Khalifa Niass et Samuel Sarr, l’ancien ministre de l’Énergie sous le régime de Me Abdoulaye Wade, avaient «détourné et revendu des voitures offertes à l’Etat du Sénégal». Selon lui, ces deux hommes proches de l’ancien Président Macky Sall doivent rembourser 3,5 milliards FCFA.
Par ABLAYE DIALLO
L’ancien chef de l’État, Macky Sall, a rangé beaucoup de dossiers dans les tiroirs et protéger jusqu’à son départ ses soutiens politiques malgré les malversations à hauteur de centaines de milliards FCFA. Après les révélations faites par le gouvernement lors de la conférence de presse sur l’état des lieux sur les finances publiques avec le maquillage et la falsification des chiffres des comptes publics orchestrés par les argentiers du défunt régime, le Directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), Fadilou Keïta, a fait des révélations explosives sur la gestion de ses prédécesseurs.
«Qu’est-ce qui peut justifier une location de véhicules pour 15 milliards FCFA ?»
Il y a des détournements de fonds et des biens de l’État à une échelle invraisemblable. Le sulfureux Ahmed Khalifa Niasse et l’ancien ministre de l’Énergie sous le régime d’Abdoulaye Wade, Samuel Sarr, sont tenus de rembourser une forte somme à l’État du Sénégal. « Je suis tombé sur un rapport de 2013 ou 2014 qui avait été rendu public dans lequel il est clairement mentionné que Ahmed Khalifa Niasse et Samuel Sarr doivent 3,5 milliards FCFA à l’État du Sénégal qu’ils doivent rembourser. C’est mentionné noir sur blanc dans le rapport. Des voitures qui ont été offertes au Sénégal que ces personnes-là ont détournées et ont dit qu’ils les avaient achetées et les ont vendues à l’État du Sénégal. Ces gens-là, jusqu’à cette date, doivent rembourser ces 3,5 milliards-là. Et il y en a plusieurs comme ça. Ce sont des rapports publics », a déclaré le DG de la Caisse des dépôts et consignations, Fadilou Keïta.
«Des milliards tirés sur les comptes du Sénégal entre le 24 mars 2024 et la prestation de serment du Président Bassirou Diomaye Faye»
À l’en croire, il y a des choses beaucoup plus graves que le vol de voitures offertes à l’État du Sénégal. Il révèle le décaissement de 15 milliards FCFA juste pour une supposée location de véhicules : « Il y a des acquiescements qui ont été signés de gauche à droite. Je suis tombé sur une lettre de confort pour 15 milliards FCFA pour la location de véhicules. Qu’est-ce qui peut justifier une location de véhicules pour 15 milliards FCFA ? Ces gens-là vont dans des banques et font de retraits de 200 millions, 300 millions, 500 millions FCFA. Je l’ai vu ».
«L’affaire des 94 milliards sera relancée. Toutes les personnes impliquées, comme Mamour Diallo et Tahirou Sarr, devront forcément répondre de leurs actes»
Pire encore, les errements de son prédécesseur Cheikh Issa Sall ne s’arrêtent pas là. Le boss de la CDC et cadre de Pastef balance : « Entre l’élection du 24 mars 2024 et la prestation de serment du président de la République, les gens se sont empressés de faire des ordonnancements et de tirer des milliards FCFA sur les comptes du Sénégal. Etant informés de cela, nous avions saisi le Premier ministre qui a pris des mesures conservatoires pour stopper la saignée. ». L’ancien patron de l’ONAS Mamour Diallo peut s’inquiéter car l’affaire des 94 milliards FCFA est loin d’être enterrée. « Il y a un rapport de l’OFNAC qui confirme l’histoire des 94 milliards FCFA. Si aujourd’hui Ousmane Sonko sort et expose sur les 94 milliards FCFA, ces personnes qui ont été directement impliquées, comme l’ancien Directeur des Domaines Mamour Diallo et Tahirou Sarr, devront forcément répondre de leurs actes. Cette affaire sera relancée. C’est de l’argent public », soutient Fadilou Keita.
«Les chiffres donnés par le Premier ministre ne sont pas sortis ex nihilo. Ils proviennent de rapports des Corps de contrôle de l’État»
Le Gouvernement avait savoir que le déficit budgétaire a été annoncé à une moyenne de 5.5% du PIB durant la période 2019-2023 alors qu’en réalité, il a été en moyenne de 10.1%, quasiment le double, durant les règnes d’Amadou Ba, Abdoulaye Daouda Diallo et Moustapha Ba aux Finances. Fadilou Keita est revenu sur ce scandale et admet ne pas être surpris de l’absence de démenti des personnes nommément citées par le Premier ministre Ousmane Sonko. « Les chiffres donnés par le Premier ministre ne sont pas sortis ex nihilo. Ils proviennent de rapports des Corps de contrôle de l’État. Ils ont été exploités et soumis à d’autres organismes de contrôle, traités par le staff qui travaille autour du président de la République et du Premier ministre mais aussi soumis à des experts qui sont au niveau des régies financières et au niveau des ministères comme le PM a pu le dire. C’est la raison pour laquelle, il a tenu la conférence de presse en relation avec le ministre de la Justice (Ousmane Diagne) mais aussi le ministre de l’Économie et du Plan (Abdourahmane Sarr) pour exposer des chiffres et corroborer des éléments qui permettraient à chacun de pouvoir travailler en contradiction avec ce qu’il a exposé », signale le DG de la CDC.
«Depuis qu’Ousmane Sonko a émis ces chiffres, Amadou Ba, Abdoulaye Daouda Diallo et Moustapha Ba n’ont pas démenti»
Et Fadilou de préciser : « Depuis qu’il (Ousmane Sonko) est sorti et a émis ces chiffres, aucun membre de l’ancien régime notamment les ministres qui ont été cités Amadou Ba, Abdoulaye Daouda Diallo et Moustapha Ba, même les personnes qui communiquent pour eux, n’a émis un démenti. Ce qui me force à croire ces chiffres sont corroborés d’autant plus que M. Ousmane Sonko depuis une dizaine d’années a entrepris de dire que le gouvernement travaillait dans une opacité totale. Il disait que toute la communication qu’il y a autour des Finances publiques n’était pas sincères que les chiffres donnés de part et d’autre n’étaient pas conformes à la réalité. Il a dit, depuis 2017, à l’Assemblée que les chiffres donnés sont erronés. Il a sorti plusieurs fois des éléments en conférence de presse que personne n’a pu contredire ». Fadilou Keïta rappelle également que le précédent chef d’Etat Macky Sall a fait doublement mal au Sénégal et qu’il mérite d’être traduite devant la justice du pays pour haute trahison : « Il a emprisonné des Sénégalais et brisé des ménages. On parle de plus de 80 décès dans les événements politiques entre 2021 et 2024, il est directement impliqué. Il existe aussi un carnage financier qu’on lui impute. Macky Sall peut facilement être jugé pour haute trahison. Il a prêté serment pour protéger les intérêts du Sénégal. Il a exposé le Sénégal en donnant de faux chiffres. Parce qu’il a permis aux uns et aux autres de spolier nos ressources financières. Mais le plus grave, c’est qu’il a été plus arrogant que ça en disant publiquement face caméra que tous ces rapports-là, il les avait sous le coude et qu’il ne les publierait pas au risque d’embraser le pays ».
«J’ai pu établir un préjudice de 30 à 40 milliards
sur la vente des terrains de l’aéroport Senghor»
Le scandale de la vente des terrains de l’aéroport Léopold Sédar Senghor a été aussi évoqué lors de l’émission du Grand Jury de la RFM du dimanche. Le Directeur de la CDC a pris des engagements fermes : « On va vendre notre foncier et à argent comptant. On va vendre à la valeur vénale, récupérer nos 30 milliards et les investir dans les projets structurants de l’État et poursuivre nos missions ». Il dévoile que « les conditions sur le mandat de commercialisation n’ont jamais été respectées. Le plan a été modifié plusieurs fois. Le modèle de contrat de réservation recense des articles qui donnent libre cours à la spéculation. Des personnes qui étaient en charge de la commercialisation en ont directement bénéficié. En faisant la revue, j’ai pu établir un préjudice qui est d’environ 30 à 40 milliards. Ce qui s’est passé aussi, c’est que des gens ont reçu des lots de terrains, ont vendu et ont spéculé ».