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DÉCÈS DE SERIGNE MOUSTAPHA SALIOU MBACKÉ Le Sénégal perd un gardien de l’orthodoxie islamique

Fils du cinquième Khalife général des Mourides, Serigne Saliou Mbacké, Serigne Moustapha Saliou Mbacké est décédé, dimanche, à Touba. Sa disparition, à 82 ans, laisse un grand vide au Sénégal. Yoor-Yoor Bi retrace le parcours sans faute de ce gardien de l’orthodoxie islamique.

Par SERIGNE SALIOU GUÈYE

« Vous ne verrez jamais un fils de Serigne Saliou dans les allées du pouvoir en train de quémander des passeports diplomatiques, des terrains ou des marchés ». Ainsi parlait, dans un Sénégal marqué par la quête effrénée de subsides, Serigne Moustapha Saliou Mbacké. C’est dire à quel point l’homme était attaché aux valeurs cardinales enseignées par son grand père Khadimou Rassoul et perpétuées de si belle manière par son père Serigne Saliou Mbacké.

Figure respectée de la Mouridya et défenseur acharné de l’Islam

Reconnu pour son érudition et son engagement dans l’agriculture, il était une figure respectée au sein de la communauté mouride. Son orthodoxie, sa rigueur intellectuelle et son franc-parler lui ont valu l’estime de ses pairs et au-delà, de l’ensemble de la communauté musulmane. Fils de Sokhna Maty Diakhaté et de Serigne Saliou Mbacké, il était connu pour son attachement aux enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké (1853-1927), le fondateur du mouridisme. Toujours vêtu d’un grand boubou et d’une écharpe blanche, il incarnait courage et vertu. « Un pilier vient de nous quitter. Une personnalité d’une dimension exceptionnelle. Grand érudit au savoir encyclopédique et insondable, Serigne Moustapha vouait un amour inégalable à Cheikhoul Khadim », a témoigné sur sa page Facebook, Serigne Cheikh Abdoul Ahad Mbacké Gaïndé Fatma. Selon le président de la Commission Culture et Communication du Grand Magal de Touba, le défunt était le défenseur infatigable tant craint et redouté par les ennemis de l’islam.

Il avait renoncé à sa part des 6 milliards versés par Dangoté aux héritiers de Serigne Saliou

Au moment où les reniements spectaculaires et les louvoiements opportunistes font florès, Serigne Moustapha Saliou Mbacké a affiché, toute sa vie durant, une constance toujours rafraîchissante. Pourtant cet acte n’est que la continuité d’une philosophie. À Touba, «il ne cessera de surprendre». Et dans la galaxie des marabouts, il dérangeait par son franc-parler. Serigne Moustapha Saliou abhorrait, par-dessus tout, les compromissions. Ce qui faisait de lui un marabout craint, respecté et adulé.

D’ailleurs, l’épisode l’opposant au géant nigérian de l’industrie, Aliko Dangoté, a été le théâtre d’une épique lutte de convictions dans laquelle le marabout s’est illustré avec une intransigeance surréelle. Le dénouement final raconte un Serigne Moustapha Saliou renonçant au profit de ses frères et sœurs à sa part du pactole de 6 milliards versés par l’industriel nigérian pour accéder à sa cimenterie dont l’ouverture a été retardée par des procédures à rebondissements multiples. Acteur majeur lors de ce feuilleton judiciaire, il a, au final, décidé de rester en phase avec ses convictions. Une évaluation révèle que le marabout a renoncé à 83.125.000 F CFA au profit de quatre frères et de ses 3 sœurs sur les 6,650 milliards que le magnat nigérian a remis aux héritiers du 5e Khalife général des mourides.

Il a fait ses humanités chez Serigne Souhaibou Mbacké et a été éduqué par Serigne Abdoul Ahad

Très rigoureux aussi bien avec ses enfants qu’avec ses talibé, Serigne Moustapha a fait ses humanités chez Serigne Souhaibou Mbacké et a été éduqué par Serigne Abdoul Ahad. Il ne fait pas de compromission avec le pouvoir. En 2007, il n’avait pas reçu l’ex-chef de l’Etat qui voulait lui présenter ses condoléances après le rappel à Dieu de Serigne Saliou. Très véridique, il dit ce qu’il pense. Serigne Moustapha Saliou, c’est aussi l’écrivain. À son actif, le livre «les versets tombent, l’histoire certifie» publié en 1999 et traduit en anglais et en français.

Humilité proverbiale

Serigne Moustapha Saliou, c’est l’humilité car, il est l’un des rares marabouts qui n’hésitent pas à emprunter un taxi à Touba. Très attaché à l’idéal mouride, Serigne Moustapha Saliou Mbacké n’avait pas hésité lors de l’inauguration de la mosquée Boukhatoul Moubarak à Touba à s’insurger contre les sectes sataniques qui, sous couvert d’un soi-disant «islam orthodoxe» et par divers procédés, tentent de dévier les populations de la bonne voie. «Ils peuvent construire des mosquées ou créer des écoles coraniques, porter le manteau de mécène ou se vêtir d’habits d’adeptes d’œuvre de bienfaisance ou encore de membre d’organisation des Droits de l’homme etc., mais leur objectif principal est d’éradiquer l’islam», avait-il martelé.

Un modèle de transparence

Le seul déplacement qui est connu à cet agriculteur est son déplacement à Istanbul lors du Sommet sur l’habitat où la ville de Touba a été consacrée comme «ville modèle» par l’organisme des Nations Unies pour les Établissements Humains à Istanbul en 1996. Serigne Moustapha, c’est aussi un modèle de transparence. Pour la première fois, après le rappel à Dieu d’un khalife général, l’argent que les talibés avaient mis à sa disposition et les dépenses effectuées plus ce qui restait en caisse étaient connus du grand public. C’est ce qu’il avait fait en 2008 quand il remettait le compte Serigne Touba à El Hadji Mouhamadou Lamine Bara Mbacké, tout nouveau khalife successeur de son père Serigne Saliou Mbacké.

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