Le pouvoir socialiste a initié à la fin des décennies 1970, un vaste programme de redressement économique et financier du Sénégal. Les politiques agricoles, industrielles, culturelles et financières obéiront aux injonctions du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale. Ainsi, l’Ajustement structurel sera le référentiel de l’Etat réduit à sa fonction la plus simple : organiser et ouvrir le marché national à l’étranger, assurer la stabilité et la sécurité du pays. Le président de la République, Abdou Diouf mènera son action dans l’espoir de faire plus et que son prédécesseur, Léopold Sédar Senghor.
Le retrait de la puissance publique des secteurs névralgiques, notamment, du système éducatif, singulièrement de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de la santé, du transport et de la vie culturelle sera une des conséquences majeures du modèle de développement néo- libéral. La fin de règne du pouvoir socialiste en 2000 mettra à nu l’échec et les faiblesses des choix à la fois économiques et politiques de l’Ajustement. L’Etat et l’économie sont à genoux. Les héritages fondamentaux laissés par le Président- poète sont totalement détruits et anéantis.
Le tissu agricole et industriel battra de l’aile. Le démantèlement de la Saed, des Ics, de nombreux joyaux agro-industriels sans oublier du reste la forteresse éducative se conjugue à un Etat surendetté et impuissant à faire face à une demande sociale croissante et à l’emploi des jeunes diplômés.
La première alternance survenue en mars 2000 ne remettra pas en cause les fondements de ce modèle libéral. En dépit de la volonté politique du Président de la République, Abdoulaye Wade de redresser les secteurs socio-économiques à travers les réformes de l’École, de l’Université et du système sanitaire et des investissements significatifs dans les domaines infrastructurels dont les routes, les hôpitaux et des Universités régionales, le pouvoir libéral ne parviendra pas à sortir le Sénégal du marasme socio- économique du sous- développement endémique. Contrairement aux apparences républicaines trompeuses de l’élan de la transformation structurelle du modèle de développement hérité des socialistes et des libéraux, les républicains vont plomber le développement endogène. Le président de la République, Macky Sall quitte le pouvoir en 2024. L’endettement vertigineux résultant de travaux routiers de prestige ou de marketing international et le déficit budgétaire colossal constituent des indicateurs macro- économiques de l’échec d’une gouvernance politique et économique aspirant à faire du Sénégal, un pays émerge.
Le Sénégal découvre en mars 2024 un pays en ruine sociale, économique et politique. La dimension extravertie de la gestion des républicains illustre l’impasse du modèle néo-libéral. Le pays dépend de l’importation pour se nourrir, pour se vêtir, pour se soigner et pour apprendre. L’Etat a pratiquement laissé entre les mains des entreprises étrangères et les multinationales, les secteurs stratégiques en l’occurrence, l’eau, l’électricité, le téléphone et le foncier. Quelques opérateurs privés nationaux se sont transformés en des sous-traitants nationaux des grandes entreprises occidentales et mondiales. L’échec du modèle néo-libéral se mesure aussi à travers la corruption au cœur du fonctionnement de l’Etat clientéliste dans ses relations avec les opérateurs privés et les acteurs de la société. La corruption est devenue en moins de deux décennies un véritable cancer politique et économique. Les passations de marchés publics ont obéi à des logiques clientélistes défiant toute rationalité et tout patriotisme économique.
On parle de milliardaires sans entreprises dans un pays à reconstruire sur les plans, singulièrement, en matière d’investissements productifs, de financement du développement et de création d’emplois. La majorité présidentielle patriotique hérite en 2024, ce modèle économique tourné à l’étranger et à bout de souffle. Le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye a courageusement impulsé l’alternative au modèle néo-libéral. La première alternative entend ainsi mettre en œuvre le Sénégal 2050. La rupture systémique avec le développement extraverti est une condition pour la réussite des politiques sociales, culturelles, sportives et économiques. À ce titre, la transformation de l’agriculture et l’industrialisation constituent deux leviers moteurs du développement endogène durable et structurant. Cette transformation du visage de l’économie nationale passera nécessairement par les pôles régionaux de développement bien structurés et en cohérence avec l’objectif stratégique du Sénégal 2050. Parallèlement à cet axe stratégique, il faudra recentrer notre système éducatif, les écoles de de formation professionnelle, la formation académique et la recherche scientifique autour des secteurs vitaux du développement, la maitrise des Nouvelles Technologies et de l’intelligence artificielle. Évidemment, le secteur privé national et notre élite culturelle, économique et politique devront avoir une place privilégiée dans la rupture avec le modèle néo- libérale et sa version extravertie.
Le privé national doit être redéfini, mieux pensé et structuré en fonction de ses compétences et des besoins réels de l’économie sénégalaise. Dans ce sillage de la refondation de l’économie nationale et régionale, le secteur informel doit faire l’objet d’un traitement radicalement différent des méthodes clientélistes et politiciennes antérieures. L’Etat et les banques nationales doivent accompagner le secteur privé dans le processus de sa réorganisation et le recentrage de l’informel dans des activités formelles productives de richesse nationale. Le développement endogène ne signifie point l’autarcie et la fin du commerce extérieur. Au contraire. Le Sénégal doit inscrire son développement agricole, industriel, scientifique et culturel dans les dynamiques de l’intégration politique, économique africaine et la coopération internationale acceptable et bénéfique à tous les partenaires du développement international. Assurément, l’horizon du Sénégal 2050 ouvre des perspectives de rupture avec le modèle néo-libéral et des opportunités inouïes que le pouvoir patriotique doit exploiter en intelligence avec tous les acteurs partisans du développement d’un Sénégal juste, prospère et souverain.
MAMADOU SY ALBERT