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REJET TOUS AZIMUTS Le dialogue déjà mort-né de Macky

Lors de son entretien avec nos confrères de la RTS, E-média, Seneweb et Le Soleil, le Président sortant Macky Sall avait déclaré : «À ma connaissance, tous les candidats acceptent le dialogue». Et pourtant, parmi les 19 candidats reconnus par le Conseil constitutionnel, les 16 réunis au sein du Front des candidats à l’élection du 25 février (FC25) rejettent collectivement et catégoriquement de prendre part au dialogue prévu ce lundi 26 février à Diamniadio. La société civile, dans son écrasante majorité, refuse également de cautionner une forfaiture du patron de l’Alliance pour la République. Le dialogue déjà mort-né, le FC25 et la société civile exhortent Macky Sall à fixer la date du scrutin avant le 02 avril prochain, jour de l’expiration de son mandat.

Par ABLAYE DIALLO

Au lieu d’organiser l’élection présidentielle le 25 février 2024 et de sortir par la grande porte, le Président sortant Macky Sall a délibérément saboté le processus électoral en se servant des accusations mensongères des parlementaires du PDS. En dépit de la décision du Conseil constitutionnel du 15 février ordonnant l’organisation de l’élection avant le 02 avril, Macky Sall refuse d’exécuter la décision de la plus Haute juridiction en matière électorale dans notre pays.

L’opposition évite le piège de Macky Sall

Pire, au lieu de se concerter avec les autorités compétentes pour fixer la date du scrutin, le Président Sall entame ce lundi 26 février un dialogue déjà boycotté par 16 candidats (FC25) retenus par le Conseil constitutionnel. La société civile s’oppose aussi au simulacre de dialogue initié par le chef de l’État. En effet, Aar Sunu Election regroupant 200 organisations citoyennes et professionnelles, des religieux et des personnalités indépendantes, rejette la pseudo-concertation nationale au Centre international Abdou Diouf de Diamniadio. Seuls trois candidats, le Premier ministre Amadou Ba, l’ancien Premier ministre Abdallah Boune Dionne et l’allié Idrissa Seck, sont disposés à assister à la rencontre de Macky Sall. D’où certains observateurs commencent déjà à parler de dialogue Bennoo Bokk Yaakaar. Un échec cuisant pour le chef de l’APR du moins pour l’instant.

Le 03 février, quand Macky Sall a décidé de mettre un terme au processus électoral au mépris de la Constitution et du Code électoral, il n’avait pas jugé utile de dialoguer avec l’opposition sénégalaise. On était à 10 heures du démarrage de la campagne électorale. Acculé et dos au mur après la décision historique et courageuse du Conseil constitutionnel du 15 février jugeant anticonstitutionnel le décret du 03 février et la loi portant dérogation de l’article 31 de la Constitution, Macky Sall appelle au dialogue sans vraiment convaincre grand monde. Au lieu de convoquer les autorités compétentes pour l’organisation du scrutin et les 19 candidats reconnus par les 7 Sages du Conseil afin de retenir une date, il s’est permis de faire appel à des candidats recalés grands partisans du report de la présidentielle et la reprise du processus électoral.

Manœuvres pour semer la division

Ce qui a le don d’irriter tous ceux qui sont soucieux du respect du calendrier républicain et de la décision du Conseil constitutionnel. « Il ne m’appartient pas de donner la date tant que les forces vives ne sont pas réunies. Il y a des candidats validés dans le processus antérieur et des candidats dits spoliés de leurs parrainages qui ne sont pas d’accord. Ce sont les premiers acteurs. Les autres acteurs sont la société civile, les religieux, le secteur privé et les syndicats et autres. Est-ce qu’on peut finir le processus d’ici le 02 avril ? Je ne le pense pas mais ce n’est pas ce qui est essentiel », a déclaré le Président Sall lors de l’entretien avec quelques organes de la presse nationale. Le manque de bonne foi du Président sortant est si patent que les 16 candidats ont vite évité le piège et décliné l’invitation tout en rappelant que l’élection doit obligatoirement se tenir avant le 02 avril. Trouver une date et signer un décret ne nécessitent pas deux jours de débats encore moins une centaine d’intervenants sans mandat ni légitimité pour parler au nom du peuple souverain du Sénégal.

Durant l’interview accordée à une partie de la presse nationale, Macky Sall avait soutenu que tous les 19 candidats en lice pour la compétition électorale ont donné leur accord pour participer au dialogue : « A ma connaissance, tous les candidats acceptent le dialogue. Dans le cadre du dialogue et de l’apaisement que j’ai souhaité, j’ai indiqué à mon gouvernement de prendre les dispositions pour faciliter la libération d’un certain nombre de détenus et aller au-delà puisque le pays a besoin de pardon, de réconciliation, de traverser cette période dans la paix et la stabilité ». Les militants et sympathisants des candidats l’opposition n’avaient pas manqué de manifester leur étonnement et surprise.

Le «démenti formel» du FC25

à Sidiki Kaba et Abdoulaye Sow

Le ministre de l’Intérieur Sidiki Kaba rajoute une couche en donnant l’heure et le lieu auxquels le patron de l’APR devrait recevoir les 19 candidats à la présidentielle. « Le Ministre de l’Intérieur informe que Son Excellence Monsieur le Président de la République Macky Sall recevra, en prélude au Dialogue national, le lundi 26 février 2024 au Centre international Abdou Diouf (CICAD) les 19 candidats retenus par le Conseil Constitutionnel à 11h et les candidats recalés à 12h », pouvait-on lire sur le communiqué rendu public par Sidiki Kaba le 24 février. Me Kaba a même tenu à rappeler que l’ouverture du Dialogue aura lieu le même jour à 16h sous la présidence effective de Macky Sall. Le ministre Abdoulaye Sow avait aussi, auparavant, abondé dans le même sens, sur la TFM, en s’ingéniant à jeter le discrédit subtilement sur les opposants au régime en place. Le FC25 n’avait pas tardé à apporter un « démenti formel » à toutes les allégations de collision avec le régime pour chercher des prétextes pour reporter l’élection présidentielle au-delà du 02 avril 2024. « Aucune rencontre entre les candidats du FC25 et le Président n’a été programmée avant le lancement du dialogue. (Après avoir décliné fermement l’invitation de Macky Sall, nous avons décidé d’une part, de saisir le Conseil constitutionnel et, d’autre part, d’aller à la rencontre du peuple pour organiser avec lui le véritable dialogue du peuple) », ont écrit les 16 candidats dans un premier temps. Avant d’ajouter : « Le FC25 demeure uni dans sa décision de ne pas participer au dialogue sur la date de l’élection présidentielle, et nous restons fermes dans notre engagement à défendre les intérêts du peuple sénégalais et à œuvrer pour des élections libres et équitables ». Le controversé imam El Hadji Malick Dramé qui s’est proposé d’aller au dialogue au nom de Pastef a été recadré, hier dans l’après-midi, par le MODAP (Mouvement des Doomu Daraa Patriotes)

Promesse de libération de Diomaye Faye et d’Ousmane Sonko pour amadouer les Patriotes

Le parti politique Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la Fraternité (Pastef/Les Patriotes) du chef de file de l’opposition Ousmane Sonko a été dissous par le gouvernement le 31 juillet 2023. Entre-temps, des jeunes ont été tués lors des manifestations et d’autres jetés en prison. Conscient que le candidat de la Coalition Diomaye Président, bien qu’il soit embastillé depuis avril 2023, est le grand favori de la présidentielle, Macky Sall a joué la carte d’une promesse de libération du leader Sonko et de son lieutenant Bassirou Diomaye Faye pour pousser ou contraindre le parti à prendre part au dialogue. Pour montrer un supposé dégel, le régime de Macky Sall a commencé à relâcher des centaines de prisonniers politiques dont des responsables de premier plan. Néanmoins, le mandataire de la Coalition Diomaye Président en l’occurrence Amadou Ba s’est montré inflexible en ce qui concerne le respect de la décision du Conseil constitutionnel : « Le Président Macky Sall confère des pouvoirs de nature constitutionnelle au dialogue politique qu’il n’a absolument pas. Ce n’est pas au dialogue politique de décider de la suppléance de Macky après le 02 avril et encore moins une reprise du processus électoral. Il faut qu’il revienne à la raison du Peuple qui le contraire. »

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