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Deal-politique national à Diamniadio

BBY et le PDS pactisent pour torpiller le processus électoral et le Conseil Constitutionnel

 

Dix-sept parmi les 19 candidats reconnus par le Conseil constitutionnel ont boycotté le dialogue initié par le Président sortant Macky Sall. Au Centre international d’Abdou Diouf de Diamniadio, on a eu droit à une rencontre qui s’apparentait davantage à un meeting de Benno Bokk Yakaar (BBY) et de ses alliés du Parti démocratique sénégalais (PDS) pour parler d’amnistie « des faits survenus entre 2021 et 2024 » et pour essayer de trouver des prétextes fallacieux pour torpiller le processus électoral. Il était également question de proroger le mandat de Macky Sall de deux à trois mois voire beaucoup plus avant d’organiser l’élection présidentielle. Seul Dr Philippe Tine, président du laïcat du Sénégal, a défendu courageusement le devoir de tout citoyen de respecter la décision du Conseil et exhorté le Président Sall à organiser la présidentielle avant le 2 avril au nom de l’Église catholique.

 

Par ABLAYE DIALLO

Onze jours après la décision du Conseil constitutionnel ordonnant l’organisation de l’élection présidentielle par les autorités compétentes avant le 2 avril 2024, le Président sortant Macky Sall refuse toujours de retenir une date par décret. Hier, le patron de l’Alliance pour la République est arrivé à 17H25 au Centre Abdou Diouf de Diamniadio pour procéder à la cérémonie d’ouverture du dialogue national. Et pourtant, il était prévu que les débats débutent à partir de 16H. Même l’allié de Macky Sall, Idrissa Seck a boycotté ce simulacre de dialogue.

Le fiasco du dialogue

Au total, 17 candidats parmi les 19 reconnus par le Conseil constitutionnel ont catégoriquement refusé de répondre à l’appel du chef de file de l’APR. D’ailleurs, Macky Sall a reconnu à demi-mot avec un visage renfrogné son échec patent : « Deux candidats validés ont répondu à mon invitation le Premier ministre Mahammad Boune Abdallah Dionne et le Premier ministre Amadou Ba. J’ai reçu les candidats dits spoliés de leurs parrainages et les candidats recalés à travers d’autres collectifs pour échanger avec eux. Toutes les démocraties ont leurs moments de fragilité parfois ponctués de violence. Le dialogue permet de soigner ces fragilités ». Même des candidats dits spoliés avec un certain poids politique comme l’ancienne Première ministre Aminata Touré, Abdourahmane Diouf, Professeur Mary Teuw Niane et d’autres n’ont pas répondu à l’appel de Macky Sall. L’échec est patent pour le Président sortant. Il se retrouve entouré que son ancien Premier ministre et de l’actuel PM. Le principal favori de la présidentielle Bassirou Diomaye Faye est maintenu en prison tout comme le chef de file de l’opposition Ousmane Sonko. La Coalition Diomaye Président, le FC25 dans son ensemble et la société civile ont tous boycotté le dialogue et exigé la tenue de l’élection le 2 avril.

Amnistie à tout prix avant de quitter le pouvoir

Dans une salle remplie par les anciens ténors du PDS, des responsables de Benno Bokk Yakaar et des chefs religieux et coutumiers, il était question avant tout d’expliquer la necessité de voter une loi d’amnistie générale le plutôt possible. « Je tiens à réaffirmer de façon claire et nette que le 02 avril prochain marquera la fin de mon mandat. Nous sommes à la croisée des chemins. Mon souhait est que nous puissions aller vers des élections apaisées, inclusives et transparentes. A cette fin et dans un esprit de réconciliation nationale, je saisirai l’Assemblée nationale dès ce mercredi en Conseil des ministres d’un projet de loi d’amnistie générale sur les faits se rapportant aux manifestations politiques survenus entre 2021 et 2024 », a déclaré le Président sortant. Il a tenté de trouver l’argumentaire de son obsession de faire passer cette loi : « Je souhaite, au-delà des soucis légitimes de justice et de redevabilité, que l’amnistie et le pardon par leurs vertus salutaires pour la nation nous aident à surmonter ces moments difficiles afin que notre cher pays réconcilie avec lui-même en remettant toutes ces forces vives autour de l’essentiel, la sauvegarde de l’unité nationale, la préservation de l’Etat de droit et de la République. Cela permettra de pacifier l’espace politique, de raffermir notre cohésion nationale et de maintenir notre rayonnement démocratique de notre pays. J’ai convoqué ce dialogue national dans cet esprit conformément à mon message du 3 février ».

L’élection présidentielle avant l’hivernage

Bien que poussé vers la sortie par toute l’opposition et le peuple sénégalais qui souhaitent aller aux urnes, Macky Sall a montré une fois de plus son mépris pour le corps électoral et le Conseil constitution. Et le tout sous les applaudissements d’une vielle classe politique en déphase totale avec les aspirations des Sénégalais. Le chef de l’État a clairement signifié son intention de rester au pouvoir au-delà du 2 avril, date d’expiration de son mandat : « Je rappelle qu’en prenant acte de la décision du Conseil constitutionnel qui s’inscrit dans le cadre des mécanismes normaux de la démocratie et de l’État de droit, j’ai indiqué ma volonté de faire appliquer cette décision pour que le scrutin soit tenu dans les meilleurs délais. En convoquant ce dialogue qui n’est le premier du genre, je n’ai qu’un seul objectif : trouver un consensus sur la date de la prochaine élection présidentielle afin que le scrutin se tienne dans les meilleurs délais d’organisation et de transparence qui en garantissent la crédibilité sous les observations nationales et internationales. Mon vœu le plus cher est de tenir l’élection présidentielle dans les meilleurs délais et ceci avant l’hivernage prochain et dans la paix ». En clôture de la première journée du dialogue, Macky Sall a soutenu sans sourciller que proroger son mandat de 2 ou 3 mandats n’est pas une mauvaise chose en soi. Certains intervenants ont proposé au Président Sall de rester au pouvoir jusqu’en décembre 2024. D’autres encore plus obnubilés par leurs privilèges ont parlé de 2026 voire 2027.

«La Coalition Dionne 2024 réitère son souhait qu’il n’ait pas d’interruption du processus électoral pour respect des droits acquis des candidats validés par le Conseil constitutionnel»

Dans une salle où les intervenants ont très peu d’égards pour la Constitution et le Conseil constitutionnel, l’ancien PM Boune Abdallah Dionne a défendu bec et ongles les droits acquis des candidats validés : « La Coalition Dionne 2024 réitère son souhait qu’il n’ait pas d’interruption du processus électoral pour respect des droits acquis des candidats validés par le Conseil constitutionnel. Que ceux qui sont validés puissent continuer dans le processus. »

Comme à son habitude, le candidat de BBY, Amadou Ba, a une fois de plus fait preuve d’un larbinisme déconcertant devant Macky Sall : « Monsieur le Président, je peux témoigner que vous veillez au respect des institutions. Monsieur le Président de la République, nous devons dialoguer. Je suis un partisan acharné du dialogue et de la paix. Je salue cette initiative que je défends à vos côtés. Nous devons vite aller aux élections mais dans la paix car elle n’a pas de prix. Nous devons voir la formule la plus appropriée pour aller aux élections. Pour le reste, je m’en tiens à votre sagesse ».

Le camp des pourfendeurs du Conseil constitutionnel

Mamadou Diop Decroix a minimisé la portée de la décision du Conseil constitutionnel et demandé une reprise du processus électoral. Cheikh Bara Dolly Mbacké, Cheikh Tidiane Gadio et le porte-parole des candidats dits spoliés Alioune Sarr ont abondé dans le même sens. Le très controversé député du PDS Mamadou Lamine Thiam a réitéré son vœu de voir Karim Wade sur la liste des candidats quitte à fouler aux pieds la décision du Conseil constitution et saboter tout le processus électoral.

«La tenue de l’élection présidentielle avant le 2 avril 2024 est bien possible»

Dr Philippe Tine, président du laïcat du Sénégal s’est exprimé devant le Président Sall au nom de l’Église catholique. Il n’a pas manqué de souligner avec beaucoup de tact que le Chef de l’État est le grand responsable de la vive tension qui règne dans le pays : « L’Église catholique est artisan et partisan de toute forme de dialogue qui permet de bâtir des ponts pour qu’adviennent la paix et la concorde entre les hommes. Aujourd’hui 26 février 2024, moins d’un an après la clôture du dernier dialogue, la présence de l’Église catholique explique sans ambiguïté la cohérence de notre démarche de notre communauté catholique. La situation socio-politique de notre pays nous inquiète tous. Le report des élections a certainement considérablement fragilisé notre stabilité sociale qui était déjà éprouvée depuis 2021. Il est attendu que ce dialogue propose des solutions viables et salutaires pour le bien de notre nation ». Le représentant de l’Église catholique dans notre pays ne s’est pas arrêté là. En effet, il a invité clairement Macky Sall à organiser l’élection avant le 2 avril conformément à la décision du Conseil constitutionnel : « Aujourd’hui, le monde entier nous observe, nous écoute. Le monde attend de voir comment le génie sénégalais parviendra à éviter encore une fois que notre barque ne coule. Le temps nous est compté si vraiment nous voulons conserver notre image de vitrine de la démocratie en Afrique. Je me fais ici le devoir de donner quelques positions de l’Église. La première est que nous devons respecter nos institutions. Si nous ne respectons le Président de la République, nous ne pouvons pas appeler les autres à le respecter. Si nous sommes les premiers à cracher sur le Conseil constitutionnel, ne soyons pas surpris que d’autres qui appartiennent à d’autres sphères insultent nos institutions. Le deuxième point est la poursuite du processus électoral. Nous pensons qu’il est important de poursuivre le processus électoral. Il peut arriver des erreurs dans le processus mais ces erreurs ne doivent pas remettre en cause ce processus. Nous demandons que le processus soit poursuivi. La troisième proposition est la tenue de l’élection présidentielle avant le 2 avril 2024. C’est bien possible. Au-delà des élections, il faut préserver le Sénégal ».

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