Actualité Chronique Politique

Les rentiers de la politique, étouffeurs d’une alternative d’espoir

Par MOUSSA FALL

Aïssata est venue, a parlé mais n’a pas convaincu. Elle a parlé de la situation qui prévaut actuellement avec les libérations des détenus politiques appréhendés lors des manifestations de 2021 et de 2023. L’heure est venue d’apaiser les cœurs et les rancœurs afin de décrisper l’atmosphère tendue entre opposition et pouvoir ou plus particulièrement entre Ousmane Sonko et Macky Sall. Aujourd’hui, on appelle à la réconciliation de l’iceberg et de la lave.

Mieux vaut tard que jamais mais les Sénégalais, dans sa quasi-totalité, ont toujours appelé le pouvoir à être raisonnable et à libérer les jeunes alpagués lors des manifestations ou événements afférents. Croyant à son invulnérabilité voire son invincibilité, parce que entouré par une soldatesque surarmée et suréquipée et dont l’effectif a été renforcé, Macky n’a jamais voulu d’un dialogue sincère avec les vrais acteurs de l’opposition. Si le Président était dans une dynamique de décrisper la tension sociale et politique, jamais, il n’allait instruire à ses magistrats et administrations de s’acharner sur Ousmane Sonko dans l’unique but de le mettre hors du jeu électoral. Le chef de l’Etat a toujours cru que le bras de fer entamé contre Sonko allait produire des résultats bénéfiques à son compte. Que nenni ! Il a toujours cru que la répression de sa flicaille, avec l’appui de ses nervis-marrons de feu qui se termine souvent avec des pertes en vie humaine et de nombreux blessés, allait faire reculer les Sénégalais dans leur lutte contre l’injustice. Et voilà qu’à quelques encablures de son départ de la Présidence, les Sénégalais lui montrent qu’ils sont encore déterminés à protéger leur Constitution. Laquelle Constitution qu’une valetaille de godillots a essayé de violer pour prolonger illégalement la jouissance du pouvoir du Président et de son entourage. Il faut se convaincre d’une chose, ces libérations, sises sur des calculs politiques et des dividendes à récolter éventuellement, n’ont pas été effectuées de gaité ou générosité de cœur. S’il ne l’avait pas fait, le prochain Président, qui est fortement probable qu’il soit du camp de Sonko, aurait décidé de leur élargissement parce que tous leurs dossiers fortement remplis sont, en réalité, vides.

Quand Aïssata Talla Sall (ATS) déclare que le Sénégal est un pays où le droit est respecté, nous la renvoyons dans la période où elle labourait son champ politique dans l’espace de l’opposition. D’ailleurs, on rappelle à l’alors avocate teigneuse de Barthélemy Dias ces propos tenus lors de sa brillante plaidoirie du 26 janvier 2017 : «Les policiers ont reçu des instructions venant des plus hautes autorités de l’époque (celle de Wade, ndlr). Le Procureur a remporté le record du réquisitoire le plus long et l’approximation des hypothèses». Aujourd’hui, qu’elle est la Garde des Sceaux, patronne de la Chancellerie, l’ancienne chef de « Osez l’avenir » n’ose plus tenir pareils propos sur cette justice à géométrie et qui s’est illustrée pendant tout le magistère de Macky être au service de ce dernier, de ses partisans et non du peuple. Pendant douze ans, les scandales financiers ont afflué de façon exponentielle dans la sphère publique. Mais l’inlassable coude présidentiel aura étouffé toutes ces malversations et les aura éloignées de la lumière de la vérité judiciaire.

Du côté du pouvoir, un journaliste connu pour sa sonkophobie incurable a insulté un vaillant et brillant magistrat qui n’a jugé l’affaire Sonko/Mame Mbaye Niang que selon son intime conviction. Ce juge, esseulé dans les diatribes de ce journaliste de la cour et des partisans du ministre du Tourisme, n’a jamais bénéficié du soutien moral de son organisation : l’UMS.

Par ailleurs, il y a eu des appels au meurtre sur la personne de Sonko, des appels à incendies de la permanence du Pastef, jamais les auteurs de ces propos ou faits tels que Ameth Suzanne Camara, Alioune Dembourou Sow ou Pape Malick Ndour n’ont été inquiétés. Au même moment Oustaz Assane Seck, Pape Alé Niang, Maty Sarr Niang, Nafissatou Guèye, Fatou Fall, le directeur de ce canard et autres ont arrêtés, embastillées, éloignés de leurs familles pour des roupies de sansonnet ou des fariboles dans la toile. C’est cela l’Etat de droit du Président Macky Sall que vante ATS, sa ministre de la Justice. Les 95% des Sénégalais arrêtés et incarcérés lors des événements l’ont été plus par leur couleur politique que par la gravité des faits commis. Personne ne peut nous faire croire que des insulteurs patentés comme Kaliphone Sall, Ba Diakhaté, Suzanne Camara, Fatou Ndiaye alias Fouta Tampi méritent plus la liberté que ces pauvres Sénégalais qui ont croupi ou qui croupissent encore dans les geôles crasseuses de nos prisons ou sont plus clean que Cheikh Bara Ndiaye, Serigne Saliou Guèye, Pape Alé Niang, Pape Sané, Ngagne Demba Touré de retour d’exil, Outhmane Diagne toujours en exil, Papito Kara décédé en mer. Le seul péché commis par ces derniers est d’avoir choisi librement de ne pas être du même bord politique que le Président ou de jouir de leur liberté d’expression. Dans l’État de droit de Macky Sall, il faut être encarté à son parti pour jouir d’une immunité carcérale. Toute position contraire est considérée comme une infraction qui mérite une arrestation suivie d’une information judiciaire.

Aujourd’hui, les Sénégalais aperçoivent les prodromes d’une alternative d’espoir même si des rentiers de la politique essaient de la transformer en nuages de tension pour pérenniser un système qui a atteint son crépuscule, traversé sa nuit d’horreur pour laisser place à une aube naissante d’où jailliront les rayons d’un soleil auroral qui irradiera les espoirs des Sénégalais épris de paix, de justice et de liberté.

PS : ATS a déclaré que le Président Sall a sa lecture personnelle de la Décision du Conseil constitutionnel et elle aussi la sienne et que les acteurs (lesquels ? Les 19 candidats officiels ou les soi-disant spoliés, dépossédés ou autres qualificatifs privatifs ?) l’aideront à prendre dans les meilleurs délais la décision qui sied pour organiser la présidentielle. Il faut simplement rappeler à la Garde des Sceaux que la seule lecture claire et non équivoque de la Décision du Conseil constitutionnel qui vaille est celle d’organiser la présidentielle le plus rapidement possible en tenant compte du 02 avril, date de la fin irrévocable du mandat présidentiel. Toute autre lecture que celle unique et univoque du Conseil ne serait que tentative vaine et dangereuse de chercher midi à quatorze heures.

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